Sous l’ère Hédouville, l’OPC est-il avant tout une affaire de famille et alliés…

Sous l’ère Hédouville, l’OPC est-il avant tout une affaire de famille et alliés…

Depuis sa création conformément au vœu de la constitution de mars 1987, l’Office de la protection du citoyen a toujours été perçu comme une voie de recours pour les citoyens en cas de violation de leurs droits notamment par l’État haïtien. Et son dirigeant se doit d’être irréprochable dans sa façon de se comporter pour pouvoir faire autorité vis-à vis des violateurs, peu importe leur statut, au niveau de la Fonction publique. Fortement décrié au sein même du secteur des droits humains au moment de son accession à la tête de l’institution en octobre 2017, Me Renan Hédouville se retrouve, aujourd’hui, environ cinq (5) ans après, au cœur d’un scandale de népotisme. En quoi, le “Protecteur du citoyen” a -t-il dérogé par rapport à ses attributions ?

Le “Protecteur” du citoyen, Renan Hédouville assis dans son bureau

Port-au-Prince, le 6 septembre 2022.-

Protéger le citoyen, sans aucune considération, contre toutes les formes d’abus de l’Administration publique, telle est la mission première de l’Office de la protection du citoyen (OPC), une institution indépendante créée par la constitution de 1987. Il s’agit, selon l’article 207 de ladite constitution, d’un organisme national devant promouvoir et protéger les droits humains tel que le recommandent les principes de Paris et la fiche 19 des Nations Unies.

En clair, à l’initiative du Protecteur du citoyen, l’OPC se doit de mettre tout en œuvre pour défendre toute personne lésée dans ses droits au sein de l’Administration publique. Ainsi, dès réception des doléances d’une victime ou de tout témoin d’abus de l’Administration publique, l’institution doit diligenter des enquêtes avant de formuler des recommandations. 

L’OPC, dans ses attributions de gardien des droits humains, a le devoir de se mettre en mouvement contre toute révocation arbitraire, tout transfert injustifié, toutes décisions empreintes de préjugés au sein de l’Administration publique, tout en assistant la personne lésée. Au-delà de ce cas de figure, l’Office de la protection du citoyen soutient aussi les minorités victimes de discriminations et de stigmatisations en milieu du travail, notamment les femmes, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées.

S’il s’avère plutôt difficile de répertorier, ces dernières années, les investigations administratives entreprises ou d’autres efforts déployés dans les domaines précités, les sorties du Protecteur sont pourtant légions dans la presse bien entendu sur d’autres dossiers notamment politiques.

C’est un Renan Hédouville hyper actif autour des aspects comme l’insécurité, la réforme constitutionnelle ou encore l’enquête relative à l’assassinat du président de la république, Jovenel Moïse, où il est allé jusqu’à réclamer la mise en mouvement de l’action publique contre l’actuel premier ministre Ariel Henry avant de ramollir sa position et de rencontrer ce dernier quelques mois plus tard dans une atmosphère empreinte de cordialité.

Abus de pouvoir…

Pour mener à bien sa mission, l’OPC compte dans son effectif des dizaines de fonctionnaires -contractuels ou nommés- dans les conditions prévues par la loi. Et voilà que le « Protecteur », souvent incriminé dans d’autres affaires bien avant son accession à la tête de cette prestigieuse institution de l’État se voit maintenant accusé de corruption.

Dans des publications à répétition notamment sur Twitter, la radio référence FM émettant depuis la ville des Gonaïves, fait état de népotisme dont est l’auteur M. Hédouville pour avoir placé à toutes les avenues de l’office enfant, parents, proches et alliés sans mentionner d’autres privilèges accordés à ses favoris en dehors des normes régissant la Fonction publique.

Ainsi, en bon protecteur de ses partisans et proches, Me Renan Hédouville a-t-il nommé sa fille comme cheffe de son cabinet, son gendre (le mari de sa fille) comme responsable de la section informatique, un cousin, un beau-frère, sa concubine et la sœur de cette dernière à des postes clés à l’instar de la Direction Générale, de la protection sociale, de la promotion et de la communication. 

Que dit la loi en la matière ?

L’article 5-10 de la loi de 2014 portant sur la répression de la corruption punit le népotisme dans l’Administration Publique en ce sens qu’il stipule ce qui suit : « Tout agent public, tout fonctionnaire ou tout magistrat, qui use de sa position, de son crédit ou de son influence pour procurer un avantage indu ou un emploi public, au mépris des règles de recrutement établies, est coupable de favoritisme et sera puni d’une peine d’emprisonnement d’un an à trois ans de prison et de l’interdiction d’exercer une fonction dans l’Administration publique nationale pour une durée de cinq ans ». 

Les efforts de la rédaction de Télégramme360 pour obtenir la réaction du « Protecteur » du citoyen sur la question se sont révélés infructueux car il n’a pas daigné donner suite à nos messages et appels en dépit de notre insistance.

Des citoyens dénoncent le ‘’Protecteur’’ auprès de l’ULCC

Couverts par la loi de 2014 sur la répression de la corruption, des citoyens -gardant l’anonymat-sont allés dénoncer Me Renan Hédouville par devant l’Unité de lutte contre la corruption le lundi 5 septembre 2022 pour ce qu’ils considèrent comme étant une dérive institutionnelle. 

Dans leur lettre de dénonciation dont copie est adressée à divers organismes de droits humains, entre autres, Défenseurs Plus, Ensemble contre la corruption (ECC) et le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH),ils appellent le directeur général de l’ULCC, Me Hans Jacques Ludwig Joseph à enquêter sur les pratiques de Me Hédouville tout en insistant sur le fait que cette affaire de népotisme vient ternir davantage l’image de l’Administration publique haïtienne et met en péril le respect des droits humains dans le pays.

La lettre de dénonciation adressée à l’Unité de lutte contre la corruption

Jacques Desrosiers est pris pour cible…

Apparemment contrarié par les révélations de radio référence, le « Protecteur » du citoyen n’est pas allé par quatre chemins et a tout simplement indexé le fonctionnaire Jacques Desrosiers, chargé de mission à l’OPC. Dans des échanges (fuités) avec des proches sur Whattsap, Me Hédouville s’est même vanté d’avoir tranché en licenciant celui qu’il estime être à l’origine de la fuite dans la presse de ses menées incorrectes à l’Office de la protection du citoyen. 

Capture d’écran d’un tweet de radio référence fm concernant l’annonce de la révocation de Jacques Desrosiers

En réalité, le motif évoqué en coulisse n’est pas celui inscrit formellement dans la correspondance de mise à pied adressée au concerné. Journaliste de son état, Jacques Desrosiers ne souhaite pas en faire un tollé, encore moins en parler dans les médias. Il préfère suivre la voie tracée par la loi pour le règlement de l’affaire, c’est-à-dire porter plainte auprès de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSC/CA), en cas de non satisfaction à son premier recours à l’interne, au niveau de l’OPC, première entité appelée à protéger ses droits en tant que citoyen. 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Social Media Auto Publish Powered By : XYZScripts.com