Le bourbier des interventions étrangères en Haïti: c’est le titre d’un article signé Djems Olivier, Dr en Géographie

Le bourbier des interventions étrangères en Haïti: c’est le titre d’un article signé Djems Olivier, Dr en Géographie

Dans ce papier de fond publié par le Congrès Nord-Américain sur l’Amérique Latine(NACLA), le géographe haïtien dépicte la sombre histoire du va-et vient des missions internationales, en particulier celles dirigées par l’organisation des Nations-Unies sous prétexte d’aider à rendre Haïti un pays plus sûr, plus stable. Dans le cas des déploiements effectués sous le parapluie de l’organisation mondiale, le spécialiste va jusqu’à parler d’un fiasco. Et ce, malgré trois décennies d’occupation continue de la première république noire indépendante du monde. 

Après plus de 30 ans d’échec, une force armée internationale, placée sous le leadership du Kenya, ‘’prétend désormais s’attaquer aux crises politiques et aux gangs armés que l’ingérence étrangère a contribué à créer’’. 

Dans quel contexte ?

Le chercheur rappelle dans son travail qu’en septembre 2022, des gangs armés se sont emparés d’un important terminal pétrolier en Haïti, intensifiant la crise du carburant et paralyser le pays. Une situation qui a clairement démontré le pouvoir des gangs. Pour tenter d’y faire face, le Premier ministre Ariel Henry a appelé la communauté internationale à intervenir « dans les plus brefs délais ».

Mais la réponse de l’international a mis du temps à arriver. Une année plus tard, soit le 2 octobre 2023, le Conseil de sécurité des Nations Unies a finalement approuvé une résolution rédigée par le les États-Unis et l’Équateur, d’envoyer une nouvelle mission en Haïti, dirigée cette fois par le Kenya.

Dans son souci de prendre en compte tous les facteurs ayant contribué à aggraver la situation sociopolitique et sécuritaire du pays, Djems Olivier insiste dans son article sur le fait que depuis plusieurs décennies, Haïti est pris dans un cycle de crises internes et externes. « Cette spirale que le sociologue haïtien Laënnec Hurbon qualifie de démocratie introuvable, combinée à de fréquentes violences ou conflits, a conduit à l’émergence d’organisations polyvalentes,groupes armés, provoquant l’intervention étrangère.

Les interventions étrangères, notamment les opérations de maintien de la paix menées dans le pays depuis 1993, n’ont jamais apporté de solutions durables. Quand les missions étrangères partent, les mêmes problèmes reviennent ou s’aggravent. L’échec de l’intervention internationale en Haïti est bien documenté par des chercheurs tels que Ricardo Seitenfus, Frédéric Thomas, Mark Schuller et autres.

« Les 20 dernières années de présence de la communauté internationale en Haïti ont constitué l’une des séquences d’échecs les plus graves et les plus évidents mis en œuvre et exécuté dans le cadre de tout accord international de coopération ». Luis Almagro, secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA), l’a admis dans un communiqué en août2022. Les gangs criminels, a-t-il dit, ont « fermenté et germé » dans ce contexte. « Puis, voyant son échec, la communauté internationale a quitté Haïti, laissant place au chaos, à la destruction, et la violence derrière.

Haïti est aujourd’hui confronté à d’énormes défis en termes de sécurité et de stabilité politique. En plus d’une crise qui s’est aggravée depuis l’assassinat du Président Jovenel Moïse en juillet 2021, le pays a été plongé dans un état d’insécurité totale, avec la prolifération des bandes armées qui contrôlent la capitale et toutes ses banlieues. 

Des décennies d’échec de la démilitarisation et une intervention étrangère infructueuse a amené le pays dans ce précipice. Dans le scénario actuel, où les organes directeurs n’ont pas réussi à contrer l’impact significatif des organisations criminelles étrangères, l’intervention (MMSS) apparaît malheureusement comme ‘’un mal-nécessaire’’.

Les capacités opérationnelles des forces de de sécurité d’Haïti ont été considérablement réduites et le gouvernement n’a montré aucune volonté de réprimer l’existence des bandes armées. La société haïtienne se trouve aujourd’hui dans une impasse où elle n’a d’autre choix que d’accepter une autre intervention étrangère en dépit des conséquences qu’elle risque d’engendrer.

Vous pouvez lire complètement l’article original en cliquant sur le lien suivant : https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/10714839.2023.2280391

Djems Olivier (2023) Haiti’s Foreign Intervention Quagmire, NACLA Report on the Americas, 55:4, 384-391, DOI: 10.1080/10714839.2023.2280391

Djems Olivier est chercheur postdoctoral à l’Université du Québec en Outaouais au Canada et détient actuellement la bourse postdoctorale MITACS Élévation pour son projet de recherche « Habiter les territoires de la violence à Port-au-Prince.

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