Haïti : 2024 et son cortège de malheurs et d’anomalies…
Catastrophique. Le mot est en soi expressivement dur mais trop euphémisé pour décrire la réalité haïtienne dans sa totalité durant l’année 2024. Tueries de masse, nombre excessif de déplacés internes, multiplication des territoires conquis par les gangs armés, légitimation de la corruption au plus haut sommet de l’Etat, déportation massive et inhumaine d’Haïtiens par la République dominicaine notamment, exode massif de jeunes haïtiens vers les Etats-Unis (Programme Biden) …, face aux malheurs inouïs qui se sont abattus sur Haïti, l’histoire des Douze plaies d’Egypte telle que racontée par la Bible se révèle une vraie partie de plaisir.
2024, c’est l’année où les bandits armés ont définitivement prouvé que les titres et les privilèges ne confèrent pas de vrais pouvoirs à ceux qui les détiennent. Un Premier ministre ou un ministre, dans l’état actuel des choses en Haïti, n’est qu’un simple porteur de titre et un petit jouisseur de grands privilèges sans grande autorité.
Voilà la triste et ignoble leçon que nous ont apprise à nos dépens les malfrats. Il suffit de penser au voyage sans retour d’Ariel Henry rendu possible par l’auto-activation ou l’activation des gangs armés dont le porte-parole, « Barbecue », réclamait le départ sans condition. Les mauvaises langues disent que la voix de Jimmy Cherizier a fait écho à Washington qui a donné suite favorable à sa demande en lâchant le neurochirurgien jusqu’à l’humiliante privation de sa terre natale.
Prise d’assaut du plus grand centre carcéral du pays (pénitencier national) suivie de l’évasion de milliers de prisonniers, attaques ciblées et répétées contre l’Aéroport international Toussaint Louverture occasionnant la cessation des vols commerciaux en partance et vers la capitale d’Haïti, destruction de commissariats et sous-commissariats culminant vers l’assassinant de dizaines de policiers…, que n’ont-ils pas fait, les bandits pour signifier leur toute-puissance dans le non-Etat qu’est devenue Haïti ?
Acteurs anarchiques ? Agents du chaos ? Michel Soukar se persuade que les gangs armés ne peuvent être affublés de ces qualificatifs. Pour l’historien, ils sont purement et simplement des outils d’un « plan précis de destruction », des instruments de répression, de contrôle, programmés pour paralyser tout effort de reconstruction nationale.
En effet, quand des bandits ne se contentent pas seulement de voler ou de kidnapper, mais ciblent délibérément les infrastructures vitales et essentielles du pays, comme les canaux d’irrigation, les universités et les hôpitaux…, même le plus naïf des hommes n’assimilerait de telles exactions à un quelconque fait du hasard.
Malheurs…, ici et ailleurs
2024, c’est aussi l’année de toutes les humiliations pour des Haïtiens en quête de mieux-être de l’autre coté de l’Île. Avec Luis Abinader à la Présidence de la République dominicaine, l’anti-haïtianisme crasse a repris tous ses droits perdus depuis l’époque du soi-disant ‘’Beneficator de la Patria’’, Raphael Leonidas Trujillo (1930-1961), jusqu’à s’ériger en véritable programme politique.
Fermeture des frontières (terrestre, aérienne, maritime), chasse aux Haïtiens (femmes enceintes, enfants en bas âge) axée sur l’expulsion massive dans des conditions déshumanisantes et de totale indignité…, le Chef de l’Etat dominicain a renforcé à dessein les traits racistes et xénophobes de son pouvoir durant l’année 2024. Ceci au mépris des faux appels de l’Organisations des nations unies au respect des droits des migrants.
C’est aussi l’année où l’inimitié entre les deux Républiques s’est accentuée, se soldant par la non-participation d’autorités haïtiennes à l’investiture du Président Luis Abinader (16 août 2024). Les malheurs prenant visage dominicain sont d’autant plus pernicieux et fatals pour Haïti que des armes et des munitions provenant de la partie orientale de l’Île alimentent les gangs haïtiens.
CPT : quand le mal se fait ‘’pouvoir’’
Si l’on fait de la médiocrité politique une science, les politiciens haïtiens en remporteront le Prix Nobel chaque année… indubitablement. Comment des hommes et des femmes, supposément sains d’esprit en attendant la preuve psychiatrique de leur folie, ont-ils pu accoucher d’une telle chose comme la prétendue meilleure formule de gouvernance de l’heure ?
Comment la communauté internationale a-t-elle pu cautionner une telle anomalie politique sans nom ? Comment une structure qui prônait la rupture, Montana en l’occurrence, a-t-elle pu rejoindre sans vergogne le train de la continuité de la banalisation du mal ? L’on pourrait multiplier les Comment à l’infini, ils demeureront sans réponse.
Mais l’on sait Pourquoi. Simplement parce que les politiciens haïtiens sont d’une avidité de pouvoir incommensurable, et que toutes les bêtises, les sottises, les âneries et les haïtianneries sont bonnes pour y parvenir. D’où, la mise en place d’un Conseil présidentiel de transition (CPT) de neuf (9) membres à l’odeur sui generis d’une classe politique cadavérique. Rien d’étonnant que certains de ses membres soient des corrompus (Affaire BNC), d’autres complices de corrompus, donc en gros tous pourris. Haïti est habituée à des formes de gouvernement d’exception, les fameux CNG par exemple, mais sa dernière en date, le CPT, confirme son niveau de crétinisme politique et s’affirme comme la plus grande anomalie politique du premier quart du siècle.
A la fois mal et remède, problème et solution, juges et parties…, les Conseillers-présidents mènent la transition vers la tenue d’élections au profit de leurs propres partis. Faut-il en rire ou en pleurer ?
En tout cas, hormis les récentes inondations enregistrées dans le Nord du pays, 2024 a été une année où Haïti a fait l’expérience de toutes les catastrophes…, anthropiques pour la plupart.
L’année s’achève, et nous vivotons encore au pied du volcan activé par les gangs armés et leurs ‘’Maîtres’’ tout en sachant qu’il peut nous entrainer dans la mort. Après tout, n’est-ce pas cela Haïti, un singulier petit pays ?
