“Dette” de l’Indépendance: l’heure de la restitution a sonné !

Mauvais élève excellant dans l’art de rater le train, Haïti avait manqué le Grand rendez-vous de 2004 : la célébration des deux cents ans de l’Indépendance. En lieu et place d’une cérémonie officielle fastueuse et solennelle digne de la mémoire des Pères Fondateurs, le pays faisait la tragique expérience d’un énième déchirement politique.
L’histoire est connue… 2025. Deux cents ans depuis qu’un navire français – suivi d’une flottille de guerre – avait jeté l’ancre dans le port de la capitale (Port-au-Prince). Deux cents ans depuis qu’un émissaire du roi Charles X avait lancé un ultimatum : verser à la France des réparations, faute de quoi la guerre sera déclarée. Le montant exigé : 150 millions de francs, à verser en cinq (5) tranches annuelles. Somme qui dépassait largement les maigres moyens de la jeune République à l’époque.
Deux cents ans après, la rançon de 1825 pèse encore lourd sur le dos courbé d’un pays à l’économie moribonde. Ainsi, 2025 c’est l’année décisive où Haïti doit, droit dans ses bottes, mettre la France face à ses responsabilités (humaines, morales, éthiques, historiques, politiques…) une fois pour toute. C’est l’année où toute la nation haïtienne, d’une seule voix, doit dire à la ‘’République française’’, l’amie d’aujourd’hui, tout le mal qu’elle lui avait fait, il y a deux cents ans, quand elle portait le nom de ‘’Monarchie’’, l’ennemie d’hier.
En attendant que toute la nation se dresse de tout son long pour réclamer vivement « Restitution, Réparation », l’on se demande : quelle avancée depuis la mise sur pied du Comité par l’Université (mai 2024) ?
Dans une feuille de route en quinze (15) points, rendue publique en octobre 2024, le Comité national haïtien sur la restitution et la réparation (CNHRR) avait prévu que 2025 serait déclaré Année de la restitution française. Jusqu’à présent (21 janvier), aucune communication officielle n’a été faite en ce sens.
Excepté le discours quelque peu marquant du 1er janvier, au cours duquel le président du Conseil présidentiel de transition, Leslie Voltaire, avait affirmé que : « Haïti réclame la restitution de cette rançon et la réparation des torts causés par l’esclavage, reconnu depuis des années comme un crime contre l’humanité. En d’autres termes, ce n’est pas une simple revendication, mais une nécessité pour que notre nation puisse retrouver la voie de la prospérité et du respect ».
Autre point non moins important du document, le CNHRR prévoyait de recommander au Gouvernement haïtien de transmettre officiellement par voie diplomatique une ‘’Note formelle’’ au Gouvernement français pour la demande de restitution de la « rançon de l’indépendance » et les intérêts et dommages composés. Ainsi, le Gouvernement haïtien sera encouragé à initier rapidement un dialogue officiel avec la France pour la mise en place d’une « Commission Mixte pour la restitution de la rançon de l’indépendance. » Où en est-on ? Dans l’attente. Pourvu qu’elle ne soit pas trop longue… très longue.
« Révision des documents et archives nécessaires », « Organisation d’Ateliers de sensibilisation », « Organisation de Conférences et de Webinaires publics », « Organisation de rencontres avec les Professeurs et les Étudiants de l’UEH », « Renforcement des liens avec la Commission des Réparations de la CARICOM (CRC) afin de faire front commun pour constituer le plus large consensus possible face aux anciennes puissances colonialistes »…,voilà pour l’essentiel l’ensemble des points qui visent à structurer les actions de restitution et de réparation tout en renforçant la sensibilisation nationale et internationale.
Les objectifs que se fixe le Comité national haïtien sur la restitution et la réparation sont d’autant plus ambitieux et rationnels que son silence depuis le début de cette année décisive (2025) inquiète sur sa sincérité et sa capacité à déjouer tout éventuel piège que pourrait tendre l’ancienne Métropole, sachant que la question de la « dette » n’est pas un jeu d’enfant.
Comme en 2004, année marquant les 200 ans de son Indépendance, Haïti a rendez-vous avec l’Histoire en 2025, date ramenant les 200 ans du versement de la rançon de l’Indépendance à la France. Plus que jamais tributaire de l’Occident, Haïti saura-t-elle porter le pays d’Emmanuel Macron à réparer le néocolonialisme de la dette qui a freiné son développement ?
